Michel Authier, Directeur scientifique de Triviumsoft

Mathématicien, sociologue, philosophe, enseignant, créateur d’entreprise… Michel Authier (59 ans) cultive la discrétion mais cherche à faire connaître ses idées. Avec raison.Michel Authier est aujourd’hui directeur scientifique de Triviumsoft. Après en avoir été le cofondateur en 1992, avec les philosophes Michel Serres et Pierre Lévy, et le PDG. Quand on évoque cet épisode de direction, la réponse de Michel Authier éclaire sa personnalité : « A une époque de dur labeur, tel Saint-Vincent de Paul aumônier des galères, j’ai dû être PDG de Triviumsoft. C’était un grand honneur, mais ce n’était pas un grand plaisir. » Passionné, brillant, Michel Authier possède aussi ce zeste d’humour, de proximité conviviale pour montrer à son interlocuteur qu’il n’est pas dupe, sans pour autant tomber dans la fausse modestie.

Sa formation, son parcours, sa capacité à vulgariser, aurait pu le destiner à devenir l’un des chouchous des médias. Il n’en est rien. Homme de l’ombre, il ne vise pas à briller dans les salons : « Je ne cherche pas à être connu, mais je voudrais que mes idées le soient ». Et pourtant ! Tout à la fois mathématicien, philosophe et sociologue, il possède la rare qualité de savoir mettre avec humanisme sa compétence scientifique en perspective. Et de son expérience d’enseignant, il a gardé un vrai talent de pédagogue. A la question : « comment vous définissez-vous ? », il répond « Je suis moi. J’ai beaucoup de chance de faire quelque chose que je ferais de toute manière, même si je n’étais pas payé ».
Inventeur du concept d’arbres de compétences et de la notion de capital humain, il croit fondamentalement en l’homme, mais pas de manière béate. « Aujourd’hui, la richesse des entreprises ne se trouve plus dans l’appareil de production, mais dans l’humain. Nous sommes passés d’une position où l’homme servait à exploiter le capital, c’est-à-dire la richesse à une position où l’humain est devenu La richesse, qu’il faut essayer d’exploiter le mieux possible, au sens agraire du terme. Pour cela, l’entreprise doit faire appel à des ressources qui sont des méthodes, des machines, des schémas organisationnels, du capital financier qui vont mobiliser cette richesse qu’est le capital humain C’est pour aider les entreprises à mieux tirer partie de ses resources humaines que Triviumsoft poursuit l’amélioration des arbres de connaissances. La société est pourtant née un peu par hasard, et a failli disparaître au bout de quelques mois. Poussés par le Premier ministre Edith Cresson à créer une société avec une promesse de soutien, les trois fondateurs se trouvent bien seuls dix jours après, avec un changement de gouvernement. Les subventions promises n’arrivent pratiquement pas. « Mais nous n’avons pas renoncé, parce que nous avions embauché deux informaticiens, et que nous croyions vraiment à notre produit. Beaucoup de gens nous encourageaient. Je me suis dit que ma vie était là. » Et quelques mois plus tard, Digital Equipment se dit intéressé par le rachat de Trivium. La transaction ne se réalisera pas, mais tout le temps des négociations, les activités de société encore vagissante sont bien entendu maintenues. Digital deviendra le premier acheteur d’un arbre de connaissance à Triviumsoft.
Aujourd’hui, la société à des clients prestigieux comme EDF, l’un des premiers, Accenture, Groupama, AREVA ou Suez. Mais aussi des PME. Car le concept des arbres de connaissance est né avec une notion de « grand écart » revendiquée par Michel Authier. « Dès le début, nous avons travaillé avec des instituteurs, dont un qui avait une classe unique dans un village du sud de la Vienne, ainsi qu’avec des PME. Nous sommes tournés vers les très grandes entreprises par nécessité économique. »
Aujourd’hui, Triviumsoft lance une version pour PME de sa solution logicielle See-K en mode hébergé. « Notre objectif est de mettre à la disposition des PME un outil simple d’utilisation offrant les fonctionnalités essentielles à la Gestion des compétences de leurs collaborateurs. Sans oublier un secteur qui nous intéresse, celui des milieux éducatifs et associatifs. Car nous sommes très impliqués dans de nombreux programmes européens, en particulier contre la discrimination. » Michel Authier n’est décidément pas un dirigeant comme les autres.

Patrice Desmetd

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