Rude journée pour Eurocloud qui organisait ses Etats Généraux le 21 mars.
Plusieurs angles d’analyse étaient proposés et Eurocloud décernait ses trophées, tout en annonçant un programme de recrutement de revendeurs.
Cette journée débute par des chiffres. D’abord, ceux de Sylvain Leterrier, advisory services director chez KPMG. Le cabinet d’audit et de conseil a réalisé une étude sur 900 décideurs de 15 pays différents, parue fin 2011. 75% des personnes interrogées voulaient débuter un projet à très court terme, la France étant plus en pointe que les Etats-Unis. La moitié des entreprises ou administrations interrogées avaient entamé un projet en cloud, 24% du full cloud, 35% du cloud partiel.
Sylvie Chauvin, la directrice du cabinet Markess devait pour sa parts estimer, pour 2012, le marché du cloud à 2,8 milliards d’euros en France avant d’atteindre les 3,8 milliards d’euros en 2014. La moyenne annuelle de la croissance étant de 11%. Le SaaS se taille la part du lion, le PaaS part de très bas, l’IaaS également.
La demande paraît forte dans le privé, faible dans le public. Les grandes entreprises montrent à 35% un intérêt soutenu pour le cloud, chiffre voisin avec les ETI, 38%, plus fort dans les PME ou les TPE, qui sont à 42%. Les administrations qu’elles soient nationales ou territoriales ne sont que 8% à manifester un intérêt soutenu pour ces projets.
Des dynamiques différentes
Voilà pour les chiffres de base. Au passage, Markess remarque qu’il faut distinguer entre les différentes formes de cloud, SaaS, IaaS et PaaS qui n’ont pas du tout la même dynamique. D’autres consultants interrogés par Pierre-José Billotte, attirent l’attention sur des angles différents.
C’est Dominique Dupuis du CXP qui souligne la distinction entre le full SaaS et les adoptions plus limitées. Les éditeurs eux-mêmes dégagent deux stratégies, soit ils développent eux-mêmes leurs plateformes, soit ils portent les solutions assurées par d’autres. Il peut donc y avoir beaucoup de confusion, chez les prestataires comme chez le client final.
Beaucoup d’interrogations aussi, notamment sur la faiblesse actuelle de l’IaaS. Pour KPMG, cette forme de cloud computing se développe en Chine, au Mexique, en Italie même, moins ailleurs. Un simple constat. Les consultants interrogés ont paru, malgré l’insistance de Pierre-José Billotte, « sécher » sur l’explication véritable. Il semble qu’en France, l’IaaS permet d’abord de pallier des besoins ponctuels sur l’infrastructure
Les français et les européens en général semblent en tout cas plus enclins à s’engager dans des projets complets, les américains restant sur des projets hybrides. « Ce marché par son essor en France me rappelle ceux de la SOA, des EAI, du Libre », explique Mathieu Poujol directeur des technologies chez Pierre Audoin, « les français mettent du temps mais une fois lancés restent dans une bonne dynamique ». Une analyse confirmée par KPMG dans son étude.
Il reste évidemment des blocages ou des inconnues. La gouvernance des projets cloud, remarque KPMG reste mitigée, soit les responsables solutions interviennent, soit les DSI contrôlent les projets. La véritable difficulté pour Mathieu Poujol vient de certaines équipes, plus difficiles à gérer et pourtant décisives, celles de la sécurité et du stockage en particulier.
Sans sécurité, pas de cloud
Finalement, ce marché du cloud computing est-il un marché mature ? Certains indicateurs classiques le laissent penser. Il commence par exemple à se concentrer, on le voit avec quelques grands rachats. SAP a avalé Success factors. De grandes alliances continuent à se nouer, SFR et HP récemment, Atos est entré dans une alliance mondiale. Un constructeur, une SSII, un opérateur, en France et à l’international, le cloud continue bel et bien de susciter de nouveaux positionnements. Et une crainte. Elle a trait aux conditions de sécurité, « sans sécurité, pas de cloud » on martelé plusieurs intervenants ». Sylvain Leterrier rappelle la brèche intervenu chez Sony et le piratage de 80 millions de comptes, pour lui l’évènement de l’année.
La croissance de toute façon devrait être à deux chiffres d’ici 2015, selon KPMG. Pour franchir cette nouvelle étape, les Etats Généraux ont mis sous le projecteur plusieurs angles. Deux ont retenu notre attention, la distribution et la mobilité.
« La crise économique floute un peu les aspects du marché les plus intéressants » souligne Pierre-José Billotte, non seulement président d’Eurocloud, mais co-animateur de sa commission distribution. Sur ce sujet il a visiblement décidé de retrousser les manches : « l’Idée a traîné et continue de traîner que le cloud pouvait se passer du channel, nous on pense qu’il ne peut se développer sans mobiliser le channel ».
Dans la réalité, cette mobilisation n’a rien d‘évident. Pour les revendeurs de software classiques, l’heure n’est plus aux marges confortables, les éditeurs les renvoient à d’hypothétiques services. Le modèle cloud pourrait donc être une alternative intéressante. Mais sa facturation et la marge à espérer provoquent encore des inquiétudes dans le channel. La solution ? Eurocloud va mobiliser comme jamais. Avec un programme, lancé à l’automne prochain, nommé Transformers.
Les Etats Généraux ont également mis le projecteur sur l’aspect mobilité. Serge Rozenblum, directeur Europe du sud de Strategy Analytics et président de séance n’a pas manqué de noter plusieurs informations recueillies au dernier salon de Barcelone (Mobile World Congress). L’arrivée d’un terminal chez Telefonica qui intègrera VMware, il est fabriqué par Samsung. Verizon rachètant un spécialiste, Cloud Switch. Et Deutsche Telekom qui fait du cloud en mobilité son objectif n°1.
Ces grands opérateurs sont en mouvement. En face, les utilisateurs mutent à grands pas. 40% des smartphones sont payés par l’entreprise, 10% des tablettes également. Le reste, par le particulier, c’est la preuve que le Byod (Bring your on device) est une réalité. « De plus en plus de devices, d’OS différents, d’utilisateurs nomades, voilà notre horizon » souligne Serge Rozenblum. Que doit faire l’entreprise, son réseau, sa DSI ?
Cette DSI va devoir prendre en compte ce qu’elle n’aime pas, des OS différents et des terminaux qu’elle n’a pas validés. Reste les applications et la sécurité. Un vrai casse tête. il va devenir, en matière de cloud et de mobilité, illusoire pour une DSI d’imposer un seul OS et un seul terminal. Ce sera « any time, any where, any device».
André Civade