Le cloud dans le secteur public : le point de vue des analystes

Si le secteur privé adopte massivement le cloud, les institutions publiques sont pour l’heure moins réceptives. Quelles sont les raisons de ce décalage privé-public ? Une hausse des dépenses pour ce poste est-elle à espérer dans les collectivités locales ? L’État montre-t-il l’exemple ?  Tous les analystes sont unanimes : le taux d’adoption du cloud dans la sphère publique est bien moindre qu’au sein des organisations privées. Qu’est-ce qui explique cette frilosité ? Pour Aurélie Courtaudon, spécialiste secteur public chez Markess « les contraintes ne sont pas les mêmes que dans le privé, notamment en matière de confidentialité des données. Rien d’étonnant à ce que la garantie sécuritaire figure en première position des critères de choix d’un prestataire du cloud par les décideurs du secteur public », constate-t-elle. Le manque de souplesse dans les budgets publics est également un frein à son adoption. Si l’informatique traditionnelle relève de l’investissement, le cloud s’inscrit dans des dépenses de fonctionnement.

Aurélie Courtaudon, spécialiste secteur public chez Markess
Aurélie Courtaudon, spécialiste secteur public chez Markess

« Le passage en mode cloud vient grever le budget de fonctionnement », explique Olivier Rafal, consultant chez Pierre Audoin Consultants. « Or, les collectivités territoriales préfèrent inscrire leurs frais informatiques dans leurs budgets d’investissement et ainsi pouvoir récupérer la TVA », ajoute Aurélie Courtaudon. Également, la mutualisation des infrastructures impacte l’organisation et soulève des problématiques de gestion des équipes informatiques en interne, décrètent les analystes. Reste aussi « l’absence d’une offre spécifique pour le secteur public même de la part des opérateurs du cloud souverain», regrette Olivier Rafal. En outre, sur 130 prestataires interrogés pour le baromètre Markess des prestataires du cloud computing de 2014, 7 % estiment que la demande en cloud sera soutenue au sein du secteur public, 42 % qu’elle sera moyenne, 51 % qu’elle sera faible.

Le Saas avant le Iaas

Si les établissements publics se montrent prudents quant à l’accès à des ressources informatiques dans le cloud, ils en perçoivent malgré tout les bénéfices. D’après la dernière étude « Projets numériques dans le secteur public local » de Markess, 50 % des décideurs des collectivités locales affirment recourir à des services Iaas ou Saas ou prévoient de le faire d’ici 2015. « Même si la dépense IT du secteur public en Saas n’a représenté en 2014, que 2 % des frais en France », souligne Olivier Rafal, le Saas reste le point d’entrée du cloud. Grâce à des clouds communutaires à l’échelle d’un territoire, les collectivités locales se déchargent des contraintes informatiques. « En particulier celles de petite taille, qui n’ont pas toujours la capacité de stockage et d’archivage conséquent », constate Aurélie Courtaudon.

Olivier Rafal, consultant chez Pierre Audoin Consultants
Olivier Rafal, consultant chez Pierre Audoin Consultants

Toujours selon Markess, seulement 23 % des administrations centrales (ministères et  organismes sous tutelles) et 17 % des collectivités locales recourent à des solutions Iaas. Pour l’analyste, l’intérêt du Iaas reste malgré tout identifié par des intercommunalités. C’est ainsi que la communauté d’agglomération Nîmes Métropole a fait le choix de s’appuyer sur un cloud privé pour transformer son système d’information.

Une hausse des dépenses à attendre

Face à une réforme territoriale en cours de déploiement, l’essor de la dématérialisation et le souhait de développer de nouveaux services numériques, les établissements publics s’engagent à s’interroger sur le mode de consommation de leur système d’information. Markess en veut pour preuve la récente étude faisant état d’une hausse des dépenses dans le cloud d’ici 2016. Sur 50 décideurs de collectivités locales (communes, intercommunalité, conseils généraux et régionaux), 40 % confirmaient cette tendance, contre 20 % fin 2013. « En attendant, 30% ne savent pas trop comment leurs dépenses vont évoluer sur ce sujet, un peu plus de 20 % l’annoncent à l’identique et moins de 10 % à la baisse. », modère Aurélie Courtaudon.

Du côté des administrations centrales (ministères et organismes sous tutelle), on tient à montrer l’exemple en matière de cloud, alors même que les finances publiques ont tout à y gagner. Rien qu’au titre de la rationalisation et mutualisation des datacenters de l’État, le gouvernement espère dégager entre 500 à 800 millions d’économies, hors coût de personnel. Une étude du Brooking Institution a ainsi montré que les agences américaines ayant investi dans une politique de cloud ont diminué leurs dépenses informatiques de 25 à 50 %. Parmi les chantiers identifiés par l’État et confiés à la DISIC (Direction Interministérielle des Systèmes d’Information et Communication) figure la création d’un prototype de cloud privé interministériel et l’ambition d’adosser, d’ici à 10 ans, 80 % des systèmes d’information de l’État sur des technologies de virtualisation inter-applicative.

Sources Markess :

-Projets numériques associés aux orientations stratégiques des collectivités locales – France, 2014-2016

-Projets numériques des ministères et agences de l’État – Bénéfices et Perspectives 2015

Externalisation des infrastructures IT avec le cloud computing – Approches, ROI & tendances 2015

Baromètre Markess des Prestataires du Cloud Computing – Edition 2014

 

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