Interxion parie sur Marseille

Il y a quelques jours, le fournisseur de services de datacenters Interxion inaugurait son premier centre de données en province, dans la cité phocéenne. Ces 6 200 m2 d’espace, rachetés à SFR l’an passé, abritent des installations performantes et haut de gamme en plein centre de de la ville.

Créée en 1998, Interxion est une entreprise européenne basée à Amsterdam. Avec 39 datacenters disséminés dans 13 villes importantes et 11 pays (Pays-Bas, Autriche, Belgique, Danemark, France, Allemagne, Irlande, Espagne, Suisse, Suède et Royaume-Uni), c’est un fournisseur paneuropéen de services de colocation, neutre vis-à-vis des opérateurs télécom et des fournisseurs de cloud. Ses centres de calcul sont localisés à proximité des grands centres urbains européens et disposent d’une connectivité optimisée et, pour certains, d’une haute densité électrique. La filiale française a été créée dès 1999, après l’Allemagne et le Royaume-Uni. Elle y opérait jusqu’ici déjà 7 datacenters, tous situés en région parisienne. Celui de Marseille, baptisé MRS1, est le huitième.

Fabrice Coquio, président d'Interxion France
Fabrice Coquio, président d’Interxion France

Ses clients appartiennent à différents secteurs tels que le cloud, les services de télécommunications et IP, les médias numériques, les services financiers, l’intégration de systèmes ou encore l’industrie et les services. Selon Fabrice Coquio, président d’Interxion France, 40 à 45 % de ces clients sont américains.

Pourquoi Marseille ?

Les autoroutes de l’information reliant l’Europe au Moyen-Orient et à l’Asie, déployées sur près de 20 000 kilomètres, passent toutes en mer Méditerranée. Certaines poursuivent leur chemin en passant Gibraltar et, dans l’autre sens, le canal de Suez. D’autres s’y arrêtent, à Palerme, en Sicile, notamment et à Marseille (cf. carte). Deux projets majeurs, appelés SeaMeWe-5 et AAE1, sont en cours. Ces deux câbles viendront renforcer les infrastructures existantes et disposeront de capacités considérables, qui permettront de faire transiter des flux vidéos et de réduire les temps de latence. « Grâce à ces câbles, on pourra faire transiter l’information de Marseille au Caire en 7 ms, soit le même délai qu’un Marseille – Paris actuellement », précise Fabrice Coquio.Interxion5_carte

En outre, alors que jusqu’ici Marseille était un lieu de transit pour les informations, « elle est en train de devenir un lieu de contenus : les flux vont s’arrêter dans cette ville, ce qui va attirer les acteurs du cloud », estime Fabrice Coquio, qui précise que « AWS est l’un des premiers clients des nouveaux espaces marseillais ».

Marseille semble idéalement et stratégiquement placée pour Interxion : « résolument tournée vers le développement numérique et grâce à la présence de ses puissantes infrastructures, Marseille offre un rayonnement international, faisant d’elle une véritable ‘ville monde’. En y investissant, nous avons pour volonté d’étendre le hub de connectivité tout en développant les hubs cloud et de contenu, ce qui contribue à développer la mise en place d’infrastructures de classe mondiale », ajoute Fabrice Coquio. Pour en savoir plus à ce sujet, voir aussi le plaidoyer du même Fabrice Coquio : Marseille, ville monde.

Anciens et nouveaux espaces

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Au premier plan, le bâtiment de MRS1. Au fond à gauche, Notre Dame de la Garde, au fond à droite, dans la rade, le château d’If et les îles du Frioul.

C’est le 26 août 2014, à l’issue d’âpres négociations qu’Interxion a finalisé l’acquisition de ce bâtiment situé en plein cœur de Marseille, dans le quartier de la Villette, à une centaine de mètres de la tour CGA-CGM et dans le périmètre du projet Euroméditerranée. Ce sont certains clients qui, bien avant, avaient attiré l’attention d’Interxion sur ce centre de calcul : ils en mesuraient déjà l’intérêt stratégique, mais estimaient que SFR, pour qui il était un héritage, ne l’entretenait pas de manière optimale. De fait, les investissements de SFR se réduisaient à la portion congrue, ce qui commençait à se faire sentir.

Suite à son rachat par Numéricable, SFR a accepté de vendre cet équipement à Interxion, qui ne dévoile pas le montant de la transaction. Mais ce qui a été divulgué, ce sont les investissements globaux dans le centre MRS1, qui se montent à quelque 45 millions d’euros, incluant le rachat et les nouveaux aménagements. Aujourd’hui, Interxion prend en charge l’intégralité des clients existants de SFR, pour qui il agit comme sous-traitant.

De nouveaux espaces ont été créés, au-delà des quelque 3 000 m2 déjà existants dans le datacenter SFR, pour 800 m2. Ces nouveaux espaces répondent à des standards plus stricts et s’inscrivent dans le cadre d’un projet global d’agrandissement et de rénovation qui s’effectuera en plusieurs phases. À terme, MRS1 comptera quelque 6200 m2 d’espace équipé au maximum et un minimum de 6 MW de puissance électrique à disposition des clients, pour un maximum de 16 MW en raccordement réseau redondant. L’engagement contractuel de niveau de service est d’une disponibilité de 99,999% du temps et la redondance se fait par onduleurs électriques en 2N+1, de la marque Schneider Electric, avec laquelle Interxion a conclu des accords.

Les nouveaux espaces accueillent d’ores et déjà des clients bénéficiant d’un accès direct à plus de 60 fournisseurs de réseau et aux points d’interconnexion Internet France-IX et DE-CIX.

Et demain ?

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A gauche, avec la casquette de l’OM, David Ruberg, CEO d’Interxion, lors de l’inauguration de MRS1

Plus qu’un datacenter supplémentaire, MRS1 semble constituer la première brique d’un investissement stratégique pour l’entreprise, qui pour l’heure a une longueur d’avance sur ses concurrents dans la région. « Nous n’avons pas vocation à installer nos datacenters en province, à l’écart des autoroutes de l’information, mais bien dans les nœuds les plus importants », insiste Fabrice Coquio.

MRS1 a été inauguré le 14 avril dernier, en présence notamment de Daniel Sperling, adjoint au maire en charge de l’innovation et du développement par le numérique­ à la mairie de Marseille, qui a fait l’effort de dire à l’assemblée – en anglais – tout le bien qu’il pensait de cette implantation et de son inscription dans le cadre du vaste projet Euroméditerranée. Elle s’est également faite en présence du CEO d’Interxion, David Ruberg, qui en a profité pour annoncer au détour d’une phrase de son discours, presque en catimini, qu’il entendait bien poursuivre ses investissements dans la cité phocéenne et que la seconde tranche du projet serait dotée de 100 millions d’euros. Pas plus de précisions pour l’heure, cependant ; affaire à suivre.

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