L’une des 9 tables rondes organisées lors des états généraux du cloud computing a abordé les relations parfois difficiles entre les DSI et les métiers à l’heure du cloud.
Dominique Filippone, journaliste au Monde Informatique : Les craintes actuelles des DSI sont-elles justifiées ?
Laurent Seror, président d’Outscale : Oui, en partie, car il est nécessaire que le shadow IT soit à nouveau maîtrisé. Maisles tâches à faible valeur ajoutée, qui peuvent être automatisées par le cloud, doivent l’être. Il faut laisser faire les spécialistes qui savent industrialiser les processus.
Patrick Bouillot, business development executive MSP & ISV chez IBM France : Le DSI est toujours indispensable pour gérer et surveiller les services cloud. Il a pour mission de donner une cohérence à l’ensemble des données qui circulent dans l’entreprise.
Cependant, il est vrai qu’il est aujourd’hui marginalisé et qu’il a besoin de se remettre en évidence. Il doit s’adapter à son nouveau rôle, qui est celui de « cloud brocker », de fournisseur de différentes solutions aux métiers.
Edouard de Rémur, co-fondateur d’Oodrive : Je ne perçois pas de perte d’influence des DSI sur les projets globaux à l’organisation, par exemple la mise en place d’une solution de partage de documents. Le problème se situe au niveau des choix des solutions métiers, pour lesquelles on demande souvent à la DSI de valider les décisions après-coup. Je dois avouer que nous sommes nous-mêmes beaucoup passés par dessus de la tête du DSI mais nous ne le faisons plus aujourd’hui.
PB : C’est en effet souvent plus facile d’aller voir directement les directions générales ou les métiers car les DSI sont coincées par des contraintes stratégiques et techniques.
DF : comment les DSI peuvent-elles reprendre la main ?
Fabien Esdourubail, directeur des ventes entreprises chez Intel : Un point important, qui va la rendre indispensable, est la sécurité. C’est un domaine qui nécessite une vraie expertise, que la DSI est la seule à avoir dans l’entreprise.
Elle sera également au cœur des révolutions dans la manière de travailler, par exemple dans l’aménagement des espaces de travail et l’intégration des outils de collaboration.
Thomas Honegger, directeur de la filiale Esker France : Il n’y a par ailleurs plus aucune application qui ne s’interconnecte pas à d’autres et c’est le rôle de la DSI que d’assurer cette interaction.
ER : … ainsi que le provisionning et le SSO (Single Sign-On ou authentification unique). Si l’utilisateur final veut de l’autonomie, la DSI veut le contrôle.
FE : Le sujet qui va rapprocher tout le monde est le Big Data. Les directions métiers y voient un grand intérêt, mais elles vont avoir besoin du DSI pour mettre en musique les solutions.
DF : Les DSI sont-elles prêtes pour faire face à ces évolutions ?
Eric Bornet, enterprise sales manager France chez Juniper Networks : Il y a évidemment un grosse problématique d’accompagnement du changement au sein des DSI : l’idée n’est pas de se séparer des gens mais de les emmener sur des projets avec plus de valeur.
ER : L’IT doit apprendre à être proactive : en étant force de proposition, elle sera alors le feu des projecteurs. C’est une position beaucoup plus valorisante de répondre aux besoins des métiers que de freiner les évolutions.
LS : Le métier des DSI a toujours consisté à ne pas changer les choses qui fonctionnent. Le cloud bouscule cette approche. Une autre notion incontournable, jusqu’ici étrangère à la mentalité des DSI, est celle de « time to market ».
TH : Il est vrai que le sponsor est très souvent le métier. J’estime qu’une bonne approche est d’identifier les motivations de chacun, pour les amener vers un objectif commun.
LS : Il ne faut en tout cas surtout pas créer un second capitaine de navire en ajoutant une direction numérique. Ce serait une manière détournée de rendre le shadow IT officiel. Il faut que l’IT reste en charge mais se transforme.